j'ai eu sept ans il y a quelques jours. sept ans de Canada, sept ans de Québec, sept ans de Montréal, sept ans de « non merci j'aime pas la poutine, oui je sais, mais c'est comme ça », sept ans de cônes orange sur les routes en travaux et sept ans de nid-de-poules le reste du temps, sept ans de parfois il fait moins quarante l'hiver et souvent il fait plus quarante l'été, sept ans de fromage trop cher mais sept ans de sirop d'érable bon marché, sept ans et sept appartements aussi, sept ans et peut-être sept amitiés ? je n'ai jamais compté.
chaque année, ce vingt septembre 2013 (bien sûr, je suis un peu en retard) marque pour moi le premier gros tournant dans ma vie, et comme chaque année le vingt septembre,
je me demande comment aurait été ma vie si.
si j'avais finalement cédé à la peur affreuse, la boule au ventre, l'envie de vomir de trouille, le matin où mon papa m'a déposée à l'aéroport et si je l'avais finalement appelé en pleurs pour qu'il vienne me chercher (ce qu'il n'aurait d'ailleurs probablement pas fait car il me connait très bien et sait pertinemment à quel point je l'aurais regretté).
si, en voyant que je ne trouvais pas de tomates qui ont du goût, j'avais finalement décidé de rentrer en France, pour pouvoir manger les sus-nommées tomates, mais également des abricots et du melon charentais ?
si, en me rendant compte que passer Noël loin tous les ans allait me manquer et me fendiller le coeur chaque année un peu plus, j'avais finalement choisi de retourner un peu plus près, un peu moins loin, de ceux qui tous les jours me manquent ?
si, en comprenant que je ne pourrais jamais faire du vélo sans avoir mal aux fesses à cause des routes défoncés-jamais-bien-réparées, j'étais repartie aussi sec, valise sous le bras ?
et puis bien sûr, je balaye assez vite ces si. en sept ans, Montréal n'a jamais failli à ce que je venais chercher ici, c'est-à-dire moi. bien sûr, c'est très grandiloquent (quel beau mot), mais c'est pas trop loin de la vérité. il y a sept ans, je prenais l'avion mais je reviens dans huit mois ». comme on dit parfois, the rest is history ».
sept ans, c'est l'âge de raison. alors cette septième année à Montréal, j'ai acheté un appartement, j'ai adopté un chat et je me suis mariée et je suis infiniment heureuse de pouvoir me dire que pour toujours, Montréal aura été le théâtre de ces trois grandes étapes.
sept ans, et c'est très symbolique, ça transforme Montréal en l'endroit où j'ai le plus vécu dans ma vie, balayant ainsi Madrid (et Langon) qui se battaient en médaille d'or avec un joli six ans au compteur.
sept ans, et pour terminer cette année, une demande de citoyenneté. la troisième ; peut-être pas ma préférée, c'est vrai - malgré les années sans y mettre les pieds, ma nationalité chilienne aura toujours une petite supériorité, déso les français - mais tout de même.
comme toujours, je me demande si et combien de temps encore, je (on) va rester ici et comme toujours, j'essaie de peser le pour et le contre et comme toujours, ça finit en larmes parce que je sais très bien que le jour où je serai à l'aéroport pour quitter cette ville [...]
je n'ai pas réussi à terminer cet article.
j'ai eu sept ans, c'est l'âge de raison, mais je ne veux pas encore penser à la suite.
je n'ai pas beaucoup de photos de Montréal et, ces derniers temps, je dois avouer que j'ai 1. beaucoup de travail, 2. pas beaucoup le temps de me promener et 3. surtout la flemme, en vrai, de trimballer mon appareil photo alors toutes les photos de cet article ont été prises au gré du temps, pendant cette septième année.